Pour l’indèpendance de l’OMS
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La vigie de la 214ème
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Cette lettre de notre collectif a été présentée lors de la conférence de presse du 22 avril 2009 à Paris dans les locaux de France Libertés - Fondation Danielle Mitterrand (Téléchargez aussi cette lettre ouverte       )

Conférence de presse du 22 avril 2009 à Paris dans les locaux de France Libertés - Fondation Danielle Mitterrand Youri Bandajevski lors de la conférence de presse du 22 avril 2009 à Paris dans les locaux de France Libertés - Fondation Danielle Mitterrand
Pr Youri Bandajevski
Conférence de presse du 22 avril 2009 à Paris dans les locaux de France Libertés - Fondation Danielle Mitterrand





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Collectif IndependentWHO
Correspondant : Éric Peytremann
54 rue Ernest-Bloch
CH- 1207 Genève
Genève, le 22 avril 2009



Lettre ouverte à Mme La Directrice Générale de l’OMS, relative à l’Indépendance de l’OMS en matière de santé appliquée au nucléaire.


     Le but de votre Organisation, tel qu’écrit à l’article 1 de sa Constitution vous demande « d’amener tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible ». Pour atteindre ce but, l’article 2 définit les fonctions de votre Organisation, notamment « agir en tant qu’autorité directrice et coordonnatrice dans le domaine de la santé », et « aider à former parmi les peuples une opinion publique éclairée en ce qui concerne la santé ».

     Le collectif des Vigies « IndependentWHO » vous adresse cette lettre pour vous rappeler vos devoirs fondamentaux. Elle est écrite au nom de toutes les victimes du nucléaire et en particulier celles de Tchernobyl, notamment les liquidateurs, les habitants des zones contaminées, les enfants présents et à venir…

     Comme nous vous l’avons déjà écrit, dans nos lettres des 24 mars 2007 et 22 décembre 2008, l’OMS, en acceptant de signer le 28 mai 1959 avec l’AIEA l’accord WHA 12-40 lui interdisant de nuire aux intérêts de cette agence, a perdu sa liberté et toute direction et coordination dans le domaine de la santé associée au nucléaire. Cette signature va à l’encontre de ses obligations constitutionnelles.

     Ainsi, début 1990, l’OMS est invitée par le Ministère soviétique de la Santé à établir un programme international d’aide. Mais, d’après la note chronologique, remise par le Dr Nakajima, Directeur Général de l’OMS (à l’époque), on apprend -au cours de la conférence qu’il a organisée à Genève les 20-23/11/1995-, que l’achèvement du programme international d’aide a été réalisé en mai 1991 par l’AIEA. C’est donc l’AIEA qui a fourni les éléments demandés par le Ministre soviétique de la Santé, en lieu et place de l’OMS.

     Par ailleurs, les actes de cette même conférence portant sur les conséquences de Tchernobyl ont été censurés. Une censure dont le Dr Nakajima témoigne devant la TV suisse/italienne en juin 2001 (1) en l’attribuant aux liens juridiques entre l’OMS et l’AIEA. À notre connaissance, ces actes n’ont pas été publiés à ce jour.

     Depuis le 26 avril 2007, tous les jours ouvrables, de 8h à 18h, une action non-violente représentée par notre Collectif rappelle l’OMS à ses devoirs. Devant votre immeuble, des Vigies vous questionnent en silence pour demander l’indépendance de l’OMS, afin que la vérité remplace le mensonge sur le bilan sanitaire de Tchernobyl. Vous continuez en effet à soutenir avec l’AIEA que la catastrophe de Tchernobyl a causé une cinquantaine de morts et 4000 cancers de la thyroïde. Ce dernier bilan date du 5/9/2005 (2). Votre négation de toutes les autres victimes passées, présentes et à venir est inacceptable compte tenu de votre haut niveau de responsabilité.

     Vous n’êtes pas sans savoir que votre position devient pour le moins critiquable au vu des récentes conclusions d’organismes dûment reconnus par les institutions internationales dont vous faites partie. Lors de sa 54e session du 29/5 au 2/6/2006 et dans son rapport sur les « Non targeted and delayed effects of exposure to ionizing radiation » ( § C 29 à 33 ), l’UNSCEAR (Comité Scientifique des Nations Unies pour l’Etude des Effets des Rayonnements Ionisants), a en effet remis en cause un « dogme » dans le domaine de la radioprotection des vivants.

     Le 15/9/2006 l’IRSN (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire) a fait une synthèse du rapport de l’UNSCEAR. Ce dernier reconnaît que « les effets non ciblés (effets dont les mécanismes semblent être différents les uns des autres) présentent une caractéristique commune : ils ne sont pas en rapport avec un dépôt d’énergie au niveau du noyau de la cellule, phénomène qui constituait jusqu’aux années dernières le dogme central de la radio biologie classique. Il en découle que l’effet carcinogène est, d’une manière ou d’une autre, en rapport avec les potentiels mutagène et clastique ». Autrement dit, de faibles doses peuvent avoir des effets pathogènes.

Que fait l’OMS de ces vérités avalisées par l’organisme spécialisé des Nations Unies ?

     Une documentation détaillée sur ces questions est disponible dans les deux ouvrages ci-joints :« Le Crime de Tchernobyl » de Wladimir Tchertkoff, édité chez Actes Sud 2006 et « Tchernobyl, conséquences de la catastrophe pour l’homme et la nature » de A. Yablokov, V. et A. Nesterenko. St Petersbourg, édité chez Naouka 2007, Extraits (3). Les études, les références bibliographiques, les expériences, les analyses, les constatations et les témoignages contenus dans ces deux ouvrages confirment d’une manière évidente les conclusions précitées de l’UNSCEAR à propos des faibles doses.

     Dans les années 30, des lanceurs d’alerte avertissaient que les substances chimiques et notamment les PCB (poly-chloro-biphényles) pouvaient empoisonner l’être humain. Ce n’est qu’en 1999 que la 3e Conférence Ministérielle sur l’Environnement et la Santé organisée par l’OMS, pointe la vulnérabilité des enfants face aux composés synthétiques. L’OMS souligne dans le cadre de cette conférence l’absence inquiétante de données concernant la toxicité des substances chimiques mises sur le marché au cours des cinquante dernières années. Cette intervention tardive de l’OMS a permis la formation de l’héritage toxique que nous léguons aujourd’hui à nos enfants.

     L’autre héritage, radiologique celui-là, en voie d’être légué suite à la signature de l’accord OMS-AIEA du 28 mai 1959, peut encore être partiellement corrigé si cet accord est révisé et si vous, en tant que directrice de l’OMS, vous oeuvrez à son indépendance. La subordination de l’autorité internationale de la santé à l’agence internationale de l’énergie atomique dans le domaine crucial des rayonnements ionisants et de la santé met en danger l’humanité.

     Le « négationnisme nucléaire » de l’OMS qui tend à nier à la fois l’évidence scientifique des effets pathogènes des rayonnements ionisants sur le vivant (notamment l’effet des faibles doses) et à ne pas reconnaître tous les dommages à la santé causés aux populations par les rayonnements artificiels, doit en effet être rendu public.

     Nous tenons également à vous informer, qu’au plan juridique et en référence aux procès instruits sur le cas de l’amiante, et à partir d’un faisceau de présomptions ayant valeur de preuves, doublé du principe de présomption d’imputabilité qui reconnaît - notamment aux Etats-Unis - un lien systématique entre certaines pathologies et l’exposition à des substances radioactives, vous vous exposez à l’accusation du « crime d’indifférence ». La notion de « crime trans-générationnel », plus spécifique aux maladies radio-induites, est aussi évoquée dans les milieux judiciaires.

     Il ressort également des opinions actuelles que même si les décideurs n’ont pas agi dans l’intention de tuer ou d’infliger des souffrances à autrui, le seul fait qu’ils aient agi en connaissant tout ou partie des conséquences de leurs actes, en abandonnant à leur sort des victimes, est suffisant pour envisager leur responsabilité pénale. Par ailleurs, le principe de précaution vous oblige à prendre des décisions sur des risques sanitaires graves, notamment les risques épidémiologiques liés à l’irradiation par faibles doses, même en l’absence de preuve formelle.

     Aussi votre négationnisme nucléaire est condamnable à plusieurs titres : exposition volontaire d’autrui à un risque mortel, homicide involontaire et atteinte grave à l’intégrité physique ou psychique d’autrui, abstention délictueuse, non assistance à personne en danger…

     Nous sommes conscients de la puissance du lobby nucléaire et de son poids économique et politique, appuyés par les plus hautes autorités du monde actuel. Nous pensons que l’OMS est devenue le rouage d’un système mis en place pour se prémunir de toute inculpation et responsabilité en matière de conséquences sanitaires liées à un accident d’origine nucléaire. Mais il s’agit d’un rouage complice d’une impunité organisée intolérable.

     Il résulte de cette position de l’OMS, qui dirige et coordonne la santé dans le monde, que les politiques sanitaires nationales et internationales, appliquées aux conséquences d’accidents et d’incidents nucléaires et plus particulièrement à la catastrophe de Tchernobyl, se caractérisent par leur inadaptation ou leur immobilisme et leur silence coupable en matière d’information des populations. La détérioration du patrimoine héréditaire humain et du vivant en général devrait interpeller votre conscience de médecin dans son respect du serment d’Hippocrate.

     À cet égard, nous attirons votre attention sur le fait que lors des grands procès sur des négligences industrielles ou gouvernementales, portant atteinte à la santé des populations (Bhopal, sang contaminé, déchets toxiques…) ce n’est pas uniquement l’organisation ou l’entreprise qui a été mise en cause, mais également la culpabilité et la responsabilité des personnes physiques impliquées dans ces affaires.

     Madame, des enfants naissent et naîtront victimes de la radioactivité, surtout après Tchernobyl. Notre démarche s’inscrit dans le jugement qu’ils porteront sur vous, en tant que responsable d’une Organisation Mondiale de la Santé qui a failli à ses devoirs fondamentaux, tels qu’inscrits dans sa Constitution.

     C’est pourquoi nous réitérons, par la présente lettre, notre demande de révision de l’accord du 28 mai 1959 et l’examen des conditions permettant à l’OMS de recouvrer son indépendance.

     Dans l’attente d’une ouverture de votre part et d’une réponse à notre demande de rendez-vous, en date du 16 février 2009, veuillez agréer, Madame La Directrice Générale de l’OMS, nos salutations distinguées.

Pr Michel Fernex
PSR/ IPPNW Suisse
Alison Katz
People’s Health Movement
Wladimir Tchertkoff
Enfants de Tchernobyl Belarus

Roland Desbordes
CRIIRAD
Julie Duchatel
Centre Europe Tiers Monde
Bruno Boussagol
Brut de Béton Production

Anne Cécile Reimann
CONTRATOM Genève
Paul Roullaud
SDN Loire et Vilaine
Charlotte Mijeon
Réseau Sortir du Nucléaire




(1) « Il faut savoir que l’AIEA dépend du Conseil de Sécurité des Nations unies. Et nous autres, toutes les agences spécialisées, nous dépendons du Conseil économique et Social. Ce n’est pas une question de hiérarchie, nous sommes tous égaux, mais dans les affaires atomiques, dans l’utilisation militaire et dans l’utilisation pacifique ou civile du nucléaire, c’est l’organisation qui dépend du Conseil de sécurité qui a autorité ».... in « Controverses nucléaires », film documentaire de Wladimir Tchertkoff (www.alerte-verte.com) (Retour à la lecture)

(2) Communiqué de presse de l’AIEA, OMS, PNUD : « Tchernobyl, l’ampleur réelle de l’accident » (Retour à la lecture)

(3) Ce dernier livre, qui porte sur les conséquences sanitaires et environnementales de la catastrophe de Tchernobyl, sera publié par The Académie of Sciences, New York, en 2009. (Retour à la lecture)

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